Twilight of the Gods : quand Xilam relève de nouveaux défis

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Twilight of the Gods : quand Xilam relève de nouveaux défis

Avec la série Twilight of the Gods, sortie sur Netflix en septembre 2024, Xilam s’est attaqué à un projet ambitieux pour un public ado-adulte en imaginant un pipeline mêlant 2D et 3D à une échelle inédite pour ses studios.

L’histoire, créé par le cinéaste américain Zack Snyder et le réalisateur et animateur américain Jay Oliva, s’inspire de la mythologie nordique, suit Leif, un roi mortel, et Sigrid, une guerrière au caractère de fer, dans une quête de vengeance contre des dieux et des démons. De paysages inhospitaliers en champs de bataille sanglants ils se lancent dans un voyage périlleux, une aventure sous haute tension, portée par l’amour, la trahison et le l’épreuve.

Xilam, connu pour des séries culte telles que Oggy et les Cafards, Les Zinzins de l’espace ou Zig & Sharko, est un studio majeur dans le monde de l’animation, alliant créativité et expertise technique depuis 1999 pour créer des contenus qui rencontrent un large succès international. Avec plus de 2 700 épisodes et plusieurs longs-métrages, dont le célèbre J’ai Perdu Mon Corps de Jérémy Clapin César du meilleur long métrage d’animation en 2020, nommé aux Oscars, la société fondée et dirigée par Marc du Pontavice, a su se diversifier et innover. Pourtant, avec Twilight of the Gods, Xilam a dû relever de nouveaux défis techniques pour répondre au niveau d’exigence attendu par Netflix : gérer des scènes de bataille complexes, intégrer la 3D dans un projet 2D de grande envergure, créer une animation d’une grande fluidité.

Rencontre avec Vincent Roche, directeur technique chez Xilam, et Lilian Penzo, directrice technique adjointe 2D. Twilight of the Gods a marqué une étape intéressante dans leur carrière respective, comme dans l’évolution de Xilam. Ils nous ont parlé de leurs parcours, de leur expérience et des obstacles techniques à franchir pour mener à bien cette production.

Une direction technique au cœur de l’innovation

 « Je viens du domaine de la 3D, mais je travaille dans l’animation depuis quinze ans, en explorant différents postes en 2D et en 3D » explique Vincent Roche, en poste depuis près de sept ans. Son évolution l’a conduit à occuper des fonctions de supervision technique avec une expertise particulière dans la gestion de productions complexes, notamment en 3D.

Lilian Penzo a rejoint Xilam il y a six ans en tant que leader Rigger 2D. « Mon rôle consiste aujourd’hui à mettre en place le pipeline nécessaire, les outils et les logiciels pour atteindre le design final demandé » précise-t-elle. Elle avait déjà acquis une expérience dans l’animation notamment sur la série Kikoumba pour TF1 chez Blue Spirit, ou encore Les Minijusticiers au sein du studio Red Frog.

Ce projet a représenté pour eux un défi inédit. « J’ai travaillé sur des longs-métrages comme Titeuf, le film, mais Twilight of the Gods reste une grande première pour moi, par son aura et son format. », confie Vincent. Le format inhabituel– une série de 8 épisodes de 26 minutes créée et, en partie, réalisée par le cinéaste Zack Snyder (300, Justice League, Rebel Moon, le film d’animation Le Royaume de Ga’Hoole – La légende des gardiens…) a exigé des compétences et une organisation nouvelle. Lilian, de son côté, souligne également le caractère atypique de cette production dans son parcours, qui l’a poussée à mobiliser toute son expertise en 2D.

Image de production de Twilight of the Gods.

Un enjeu de production à grande échelle

Le projet Twilight of the Gods, envisagé à l’origine comme une production entièrement en 3D, a rapidement été repensé en 2D. « En 3D, la fabrication des assets peut devenir très complexe et chronophage, surtout lorsqu’il y a un grand nombre de personnages avec des tailles et formes très différentes comme dans cette série » explique Vincent Roche. Cette réorientation stratégique a mené à retravailler l’ensemble des designs et l’animatique en 2D dans un délai très serré. « Nous avons des pipelines que nous ajustons en fonction des séries que nous produisons. Il n’y a pas de pipeline unique ; nous choisissons les outils qui nous semblent les plus adaptés à chaque projet » indique-t-il.

Dans le cas de Twilight of the Gods, l’équipe a opté pour le logiciel Harmony de Toon Boom, un outil régulièrement utilisé par les différents studios de Xilam, particulièrement pour les productions nécessitant des rigs ou mêlant 2D et 3D.

Avec huit épisodes à produire – dont un épisode final de 42’ – et des délais serrés, la production s’est étalée sur deux ans et a mobilisé plus de 150 personnes réparties au sein des quatre studios de Xilam.

Image de production de Twilight of the Gods.

Un pipeline sur mesure

Organisée entre Xilam Paris et les trois autres sites de fabrication : Xilam Lyon (qui a depuis fermé), Xilam Angoulême et Armada au Vietnam, cette structure collaborative a permis de répartir les tâches selon les spécialisations de chaque studio, un point essentiel pour respecter les délais d’une production à grande échelle. Les points hebdomadaires entre Xilam et Valkyrie, la société créée par Zack Snyder, ont également permis de fluidifier la collaboration pour y parvenir.

D’autant que des imprévus sont apparus rapidement prolongeant la préproduction et ajoutant une étape au pipeline. Contrairement aux projets sur lesquels Xilam travaille habituellement, une partie de la matière déjà conçue et fournie, notamment les storyboards et les assets, n’était pas immédiatement exploitable. « Nous avons dû faire un travail de mise à l’échelle et de nettoyage au préalable. Nous n’avons pas touché à la mise en scène validée par Zack Snyder, mais nous avons ajusté certains éléments pour faciliter la fabrication » explique Vincent Roche.

Lilian Penzo détaille le processus : « Après le storyboard, le posing et le tracé des fonds (BG line) sans couleurs, l’animation a été faite principalement à Paris et Lyon. Puis Armada au Vietnam, s’est chargé du nettoyage des traits, de l’in-betweening et la colorisation ».

La direction artistique de la série a également été une gageure : « Comparé aux productions habituelles de Xilam, qui sont plus orientées cartoon, Twilight of the Gods comportait bien plus de détails. Nous avons dû trouver des solutions au fur et à mesure pour simplifier certaines tâches ».

Pour répondre à ces exigences et gagner du temps, l’équipe a intégré des éléments en 3D à plusieurs étapes du processus. « D’abord, nous avons modélisé en 3D certains objets comme les chevaux, certaines têtes et les armes. Ces modèles étaient importés dans Harmony pour servir de référence. Les animateurs pouvaient alors redessiner directement sur le modèle en utilisant la rotoscopie, ajustant l’objet comme nécessaire. » Cette méthode a permis de maintenir la précision et la fluidité exigées par la réalisation, tout en accélérant la production de scènes particulièrement complexes.

D’autres solutions mêlant 2D et 3D ont été mis en place : « Par exemple, pour les chevaux, nous avons créé des rigs dans notre logiciel 3D et animé des cycles de trot et de galop. Ces cycles ont ensuite été exportés en format FBX vers Harmony. Là, les animateurs pouvaient utiliser ces modèles animés pour redessiner chaque frame du galop en plaçant la caméra comme souhaité. » explique Vincent. Harmony, grâce à sa capacité native à importer des objets 3D en formats OBJ ou FBX animés, a été un atout essentiel. Ce processus a évolué au fil de la production : d’abord, la 3D servait uniquement de référence pour les animateurs. Progressivement, l’équipe a conservé certains modèles 3D jusqu’à la fin des plans, notamment pour des objets comme les armes.

Un outil passerelle avec Blender a permis d’exporter les modèles 3D pour un rendu image par image, réimporté dans Harmony en tant que séquence 2D colorisée. Cela a facilité l’ajout d’ombres 2D tout en conservant le style graphique et en évitant des traitements 3D complexes. Cette approche hybride a permis de simplifier le processus sur des éléments répétitifs, tout en conservant la flexibilité de l’animation traditionnelle.

Image de production de Twilight of the Gods.

Donner vie aux batailles : Golaem et l’alliance 3D-2D pour des combats épiques

Pour les scènes de foules et de batailles présentes dans les deux derniers épisodes de Twilight of the Gods, l’équipe a choisi d’intégrer la 3 en utilisant la solution de Golaem, société française fondée par Stéphane Donikian (NDLR : rachetée il y a quelques mois par Autodesk) qui développe des outils de création de foule permettant de remplir facilement des scènes 3D avec des personnages ou des objets dirigeables, allant de quelques unités à des milliers. Une première pour le studio Xilam. « La difficulté d’une production 2D, c’est d’arriver à animer un grand nombre de personnages simultanément », explique Vincent Roche. Les affrontements entre des milliers de personnages exigeaient une solution adaptée. Golaem, intégré dans Maya, a permis de simuler les mouvements des masses de soldats de manière réaliste. La création d’assets en 3D étant une étape chronophage elle n’a été utilisée que pour les soldats de base, les héros et héroïnes étant trop variés et différents.

Une fois les soldats créés en 3D et les scènes de bataille simulées, les images ont été importées dans Harmony pour que l’équipe puisse animer les autres personnages en 2D. « Cela a nécessité un travail de parallélisation du pipeline » précise le directeur technique.

« C’est quelque chose que nous avons déjà fait sur d’autres projets, mais pas à une telle échelle », confie Vincent Roche. Le projet a nécessité 300 plans où la 2D et la 3D se côtoient et chaque plan demandait une gestion minutieuse pour coordonner les deux formats, tout en assurant une intégration harmonieuse. « Ce qui est nouveau ici, c’est l’intensité de ce travail », précise-t-il.

Image de production de Twilight of the Gods.

Une nouvelle étape franchie pour Xilam

Le projet a permis à Xilam de s’affranchir encore une fois de son image de studio uniquement cantonné à produire des succès jeunesse. Après J’ai perdu mon corps, Twilight of the Gods a renforcé cette évolution, nécessitant de nouveaux talents et des recrutements d’experts. « L’ampleur du projet nous a obligés à recruter de nouveaux profils, notamment des experts dans ce style », explique Vincent Roche. Les équipes en place ont également été enthousiastes à l’idée de participer à un projet plus adulte, et axé sur l’action, ce qui a créé une véritable effervescence au sein des studios.

Lilian Penzo souligne que ce projet a été une occasion d’apprentissage constant. Chaque étape du projet a permis de prendre conscience de ce qui pouvait être amélioré, souvent en découvrant des aspects qui n’avaient pas été anticipés au départ. Cela a conduit l’équipe technique à revoir sa manière de penser et de travailler, a impliqué la création de nouveaux outils et leur déploiement sur les différents sites. Un processus qui a demandé une grande capacité d’adaptation.

Le rôle de la direction technique est également de fournir des formations. En tout, 70 à 80 personnes ont été formées, notamment sur l’intégration de la 3D. Lilian Penzo a pris en charge cette formation, se déplaçant jusqu’au studio au Vietnam pour former les équipes locales.

Véronique Dumon avec le concours de Luca Zutz

Image de production de Twilight of the Gods.

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